Le jaïnisme: la religion la plus pacifique du monde

Aujourd’hui j’aimerais vous parler d’une religion méconnue: le jaïnisme.

Il s’agit d’une ancienne religion indienne qui remonte à plus de 2 500 ans. Elle se fonde sur les principes de non-violence, de tolérance et de respect de la vie. Ses préceptes ont inspiré Gandhi et en font aujourd’hui une des religions les plus pacifistes qui existent. Certains jaïns préfèrent cependant le terme de philosophie à celui de religion dans la mesure où, comme les bouddhistes, ils ne vénèrent pas un Dieu tout-puissant.

Fondé par Mahāvīra, un contemporain du Bouddha, le jaïnisme a une tradition riche et complexe qui s’est développée autour de principes éthiques stricts, de pratiques ascétiques, et d’une vision du monde qui rejette toute forme de violence.

Les enseignements du Seigneur Mahāvīra sur la non-violence (Ahimsa) et la vérité (Satya) constituent l’essence du jaïnisme et influencent non seulement les pratiques spirituelles mais aussi les habitudes quotidiennes, en particulier les choix alimentaires. 

Le jaïnisme possède plusieurs textes sacrés qui sont fondamentaux pour la pratique et la doctrine de cette religion. Ces textes sont généralement divisés en deux catégories principales : les Āgamaset les textes non-canoniques. 

Qui était Mahāvīra, le fondateur du Jaïnisme?

Il s’appelait Vardhamana et on le surnommait Mahâvîra, le « grand homme » . Mahāvīra est le vingt-quatrième Jina, terme sanskrit qui signifie « vainqueur » de la guerre menée contre le karman obligeant l’âme à renaître indéfiniment. Le fondateur de la religion jaïna, ou jaïnisme est né dans une famille royale à Vaishali au début du VI^e siècle av. J.-C. 

il a renoncé à ses biens matériels à l’âge de 30 ans pour mener une vie ascétique. Il a vécu entre 599 et 527 avant notre ère en Inde. Mahāvīra a prêché les principes fondamentaux du jaïnisme: la non-violence (ahimsa), la vérité (satya), le non-vol (asteya), la chasteté (brahmacharya), et le détachement (aparigraha). Selon sa philosophie,  l’âme a besoin de se purifier à travers la méditation.

Il est vénéré par les jaïns en tant que guide spirituel et constitue un modèle de vie. Selon la tradition jaïne, il  aurait atteint le moksha (libération) à l’âge de 72 ans, marquant ainsi la fin de sa vie terrestre et son ascension spirituelle. Quoique, les dates sont controversées et diffèrent selon les traditions. Selon l’histoire jaïne, sa mort fut volontaire, il se laissa mourir d’inanition afin de gagner la Délivrance.

Qui sont les Jaïns ?

Ils seraient dix millions dispersés sur la planète, la majorité vivant en Inde. Les jaïns sont des végétariens stricts, au point que les plus pieux balaient en marchant pour ne pas écraser d’insectes et se masquent la bouche pour ne pas en avaler. Ils refusent aussi de s’alimenter avec des légumes racines dont la cueillette pourrait avoir tué des organismes vivants. Je vous laisse ici cette vidéo appelée « Les jaïns: végétariens de l’extrême ».

Les deux branches majeures du Jaïnisme

Le mouvement se divise, de longue date, en deux ordres monastiques majeurs : le Shvetambara et le Digambara. Ces deux branches partagent les principes fondamentaux du jaïnisme, mais elles diffèrent sur certains aspects doctrinaux, pratiques, et vestimentaires donc, avec des corpus de textes et des modes de vie distincts : les « vêtus de blanc » (svetâmbara) et les « vêtus d’espace » (digambara), des ­ascètes pratiquant le nudisme rituel. En effet, même si ces différences entre les Shvetambara et les Digambara reflètent des interprétations variées des enseignements du jaïnisme, les deux courants partagent un engagement envers les principes de non-violence, de vérité, et de renoncement.

Les jaïns et la compassion envers les animaux

En ce qui concerne la non-violence envers les animaux, il est certain qu’aucune religion n’est allée aussi loin que le jaïnisme : pour les jaïns, l’alimentation est très importante car elle a un impact sur la nature et les désirs de la personne. Le choix d’une alimentation végétale diminuerait les sentiments de haine et d’arrogance. 

Gandhi, même s’il était hindou, avait été influencé par cette philosophie dans sa jeunesse.

La nourriture qui pousse sous la terre est interdite dans le régime jaïn car en arrachant un légume racine, des organismes vivants sont tués.

« Tous les êtres vivants sont importants, y compris les bactéries ».

Yashovijay Suri, moine jaïn. Temple de Mumbai

Les moines ne mangent pas la nuit afin d’éviter d’avaler accidentellement un insecte. Le jour, certains utilisent aussi un tissu, qu’ils placent devant leur bouche, pour éviter d’avaler des moucherons. Ils n’empruntent pas non plus de voiture ni d’autobus, puisque les roues peuvent tuer des insectes en roulant.

Moines jaïns avec la bouche couverte d’un mupati (mouchoir) pour éviter d’avaler et de blesser des insectes ou des micro-organismes en respirant ou en parlant (crédit photo : jaïnworld.com).

(source:https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1035207/jain-inde-vegetariens-religion-vegetarisme-balai-fourmis)

Rituels et fêtes

Le jaïnisme est riche en rituels et en fêtes mais il ne s’agit pas de spectacles vides de sens au contraire, les rituels doivent imprimer les principes religieux dans l’esprit des gens. De nombreux événements de la vie de Mahavira sont fréquemment mis en scène sous forme symbolique.

En effet, Mahavir Jayanti, célébré cette année en avril, est l’ un de nombreux festivals célébrés dans le calendrier jaïn. Chaque fête ayant  ses propres rituels et coutumes.

Le Paryusana Parva est la fête la plus importante pour les jaïns. C’est une période de huit jours consacrée à la réflexion et à la recherche du pardon des péchés pendant laquelle de nombreux jaïns jeûnent et accomplissent des rituels religieux. En ce 2024 cette fête aura lieu du 31 août au 7 septembre. Le dernier jour de la fête est appelé Pratikraman (le 7 septembre) est un moment de repentance où les fidèles se demandent mutuellement pardon pour toutes les offenses commises au cours de l’année écoulée. Le pardon est demandé en disant « Micchami Dukkadam ».

« Après l’effort, le réconfort » cuisine festive jaïne et rupture du jeûne

Après le jeûne très important par sa  dimension spirituelle, s’ensuivent la rupture de ce jeûne et les repas collectifs  qui témoignent de l’excellence culinaire végétarienne. Le festival est l’occasion de savourer toute une gamme de plats qui respectent l’éthique jaïne de la non-violence et de la pureté.Parmi les plats traditionnels nous pouvons citer le Puran Poli, un pain plat sucré, le Khichdi,  le plat de riz et de lentilles que je partage aujourd’hui avec vous, le Rava Dhokla, à base de semoule, le Geela Kakra, le  sabji, légumes cuits épicés sans oignons ni ail, et tant d’autres délices.

Qu’ils soient dégustés dans les somptueux temples ou dans les cuisines familiales, les festivités révèlent la diversité de la gastronomie jaïne, liée par un fil commun: le respect des principes jaïns, qui mettent l’accent sur la non-violence et la pureté ainsi que les pratiques qui évitent de nuire à tout être vivant, y compris les micro-organismes.

1) Le régime sattvique et le jaïnisme

Il existe une minorité de jaïns pratiquant une alimentation qui est en accord avec les principes sattviques provenant de la philosophie du yoga et de l’Ayurveda. Celle-ci est basée sur  des aliments  purs, légers, favorables à la clarté mentale, à la paix et à la spiritualité. L’alimentation sattvique inclut les fruits, les légumes, les céréales, les noix, les graines, et les produits laitiers en petites quantités et dans des conditions bien établies.

Le lait doit provenir d’un animal vivant dans un environnement naturel avec une abondance de pâturages pour se nourrir. L’animal doit être traité avec amour et soin et ne doit pas être gestant. Concernant la traite, le veau est toujours prioritaire. 

Cependant, la grande majorité des jaïns, en particulier ceux qui suivent des vœux plus stricts, préfèrent éviter les produits laitiers même dans ces conditions optimales de production, en raison des pratiques modernes de l’industrie laitière, qui est l’une des plus cruelles et donc considérées contraires à l’ahimsa.

2) Le véganisme jaïn

Le jaïnisme met un accent très fort sur la non-violence envers tous les êtres vivants, qui se traduit par un régime alimentaire végétal. Les Jaïns évitent de consommer toute nourriture qui implique la violence envers les animaux, ce qui inclut la viande, le poisson, les œufs, et même certains légumes racines comme les oignons, l’ail, et les pommes de terre, car leur récolte implique la destruction d’organismes vivants.

Bien que le jaïnisme traditionnel permette la consommation de lait, certains Jaïns adoptent le véganisme, arguant que la production moderne de produits laitiers implique souvent de la violence envers les animaux, ce qui contrevient à l’ahimsa.

Ainsi, pour ces Jaïns, le véganisme est perçu comme une manière plus authentique de pratiquer l’ahimsa dans le contexte contemporain, où les industries animales sont souvent associées à des pratiques cruelles. En adoptant le véganisme, ils cherchent à minimiser leur impact négatif sur tous les êtres vivants, en restant fidèles aux principes de leur foi.

Des écolos par nature

La communauté jaïne se sent particulièrement concernée par les problèmes écologiques : pollution, réchauffement climatique, épuisement des ressources naturelles, diminution de la biodiversité, etc.

Ma réflexion sur le sujet:

En ce qui concerne les animaux, seul le jaïnisme persiste à prescrire le végétarisme et la non-violence absolue envers les animaux. D’autres doctrines, aussi pacifistes se disent-elles ont tout de même succombé à des interprétations pragmatiques de ce qu’est la compassion et le jeûne spirituel en autorisant par exemple les animaux de la mer comme si ceux-ci étaient dépourvus de sensibilité et/ou appartenaient à une catégorie inférieure à celle des autres animaux interdits.

Pire encore, les sacrifices et les abattages rituels avec l’approbation enthousiaste de la hiérarchie religieuse justifiant cette cruauté sous prétexte que tuer dans un contexte sacrificiel n’est pas tuer, ce n’est pas l’image qu’un petit agneau innocent égorgé au nom de la religion renvoie à ceux qui sont pour la non-violence et le respect de la création divine.

Pour approfondir ce sujet je vous conseille de visiter le site de la F.R.A. 

Fraternité pour le respect animal. Association  qui oeuvre pour donner une voix et une présence aux animaux dans l’Eglise et la société en général, elle questionne notamment le silence des églises face à la souffrance animale et l’absence de ceux-ci dans les réflexions théologiques 

Pensée du jour…

Prière de pardon des jaïns. Les jaïns ne cherchent pas le pardon d’un dieu tout-puissant, mais de ces êtres vivants qu’ils ont blessés.

Je pardonne à tous les êtres vivants,

Que tous les êtres vivants me pardonnent ;

Tous dans ce monde sont mes amis,

Je n’ai pas d’ennemis.

Khamemi sauve le jive,

Sawe jiva khamantu moi;

Je t’ai vu, mon frère,

Il y aura du miel dans le kenai.

Traduit de l’anglais. Source: https://jainworld.com/philosophy/rituals-and-festivals/